Les escaufailles à main en forme de boule ou de pomme

Les chaufferettes, chauffe-mains ou chauffe-pieds, ont été construits de façons bien différentes. Quelquefois c'est un petit réchaud dans lequel la braise se consume sur un lit de cendres ; d'autres fois, ce sont des récipients en forme de pomme destinés à contenir de l'eau chaude ou une boule de métal portée à une certaine température.

C'est à cette dernière catégorie qu'appartiennent les chauffe-mains employés par les prêtres du Moyen Age pendant la célébration de la messe, en hiver, pour prévenir l'engourdissement des doigts. Villars de Honnecourt, nous a laissé une relation sur la manière de faire ces appareils : "Se vos voleis faire 1 escaufaile de mains, vos fereis aussi come une pume de keuvre de ij moitiés clozeice. Par dedans le pume de keuvre, doit avoir vj ciercles de keuvre ; cascuns des ciercles a ij toreillons et ens, en mi lieu, doit estre une paelete à ij toreillons. Li torillon doivent estre cangiet en tel manière que li paelete al fu demeurt adès droite; car li uns des toreillons porte l'autre ; et se vous le faites droit si comme li letre de vos devize et li portraiture, torner le poes quel part que vos voleis, ja li fus ne s'espandera. Cis engiens est bons à vesque. Hardiement puet estre à grant messe, car ja tant com il tiegne cest engiens entre ses mains, froides nes ara, tant com fus puist durer. En cest engieng n'a plus".

Ainsi qu'on peut s'en rendre compte, cette boule de métal était formée de deux coquilles dans l'une desquelles un certain nombre de cercles munis de tourillons opposés pivotaient autour d'une capsule centrale que le jeu de ces cercles maintenait constamment dans la position horizontale. A l'intérieur de la capsule, on plaçait une bille de fer ou de cuivre rougie au feu dont le rayonnement entretenait une certaine chaleur dans la calotte extérieure de la boule.

Outre ces sphères, il existait des chauffe-mains d'autel de même forme qui étaient munis de pieds.

 
Chaufferette à eau chaude montée sur pieds

C'était certainement une chaufferette à eau chaude, que cet appareil dont on trouve la mention dans l'Inventaire de Louis d'Anjou en 1360 : "Une chaufète toute blanche, sur 3 pates à longues jambes, et y a un biberon qui part du ventre tout plains, et de l'autre par une anse tout plain sans couvercle, et poise 2 m. 1 o. - 5 autres semblables".

Ces chaufferettes étaient souvent d'un travail remarquable et dans le même document, on en relève de plusieurs formes : "Une chaufferette d'argent, dorée et cizelée et est à VI costés, dont il y en a III où il y a cascun VII testes de Lyon enlevées et est le biberons (le goulot) de la teste d'un serpent ; et a sur le fretel du couvercle un esmail a III querrés et en chascun a un petit ymage fait sur le plat. Et poise VI marcs VI onces.

Un grand chaffette quarrée dont le biberon est de la teste d'une serpent, et sur le couvercle a un esmail où sont les armes de Arragon et de Castille, esquartelez en une losenge et envirron la dite losenge a VI bestelettes et est l'ance sizelée à menu ouvrage. Et poice V marcs III onces XII deniers".

Venise semble avoir eu la spécialité de fabriquer en grand nombre ces appareils qui étaient décorés de gravure et de ciselures incrustées d'argent, à l'imitation des cuivres de Mésopotamie.

La chaufferette fut employée à de multiples usages et quelquefois on la rencontre adaptée aux besoins de la toilette :
- Fait et forgié une chaufferette d'argent blanc appelée sert de l'eau, de l'hostel du roy N.S signée sur le couvercle à un escu à 3 fleurs de liz haichiez, pes. 9 m. 3 o. 5 esc.

- Un très petit bassin avecques le chauffette d'argent doré, (Inv. Du duc de Berry).

Les chaufferettes à pieds, telles que nous les connaissons aujourd'hui, étaient richement décorées et portaient quelquefois les armoiries ou les monogrammes de leur propriétaire. Elles étaient généralement en cuivre repercé et repoussé. Au XVIe siècle, ces chaufferettes faisaient l'objet d'un très grand commerce ; les unes étaient toujours façonnées en forme de boule, d'autres, celles qu'on emportait à la messe affectaient la forme d'un livre relié, enfin quelques-unes consistaient en une sorte de petite terrine à anse et en terre vernissée.

La première mention qu'on rencontre d'une chaufferette pour les pieds a été relevée par M. Havard dans l'Inventaire du château de Turenne ou elle est ainsi désignée : "Plus ung chauffe-pieds pour Madame".

L'idée de tenir les pieds chauds a toujours préoccupé nos aïeux ; au commencement du XIXe siècle, un industriel, né malin, avait inventé des étriers munis de petites lampes à huile permettant d'éclairer la route et de procurer en même temps une douce chaleur aux extrémités du cavalier qui avait utilisé cet ingénieux système.

A l'école...

Au début pour chauffer la classe pendant l'hiver, on brûlait dans de vastes cheminées la bûche apportée par les lèves, nous en avons vu encore dans d'anciennes écoles de ces cheminées largement ouvertes. Le bois était le plus souvent dérobé aux haies ou clôtures des champs, dans les taillis ou aux tas de bois qui se trouvaient sur le passage des écoliers. Les habitants criaient, le garde champêtre recevait l'ordre de veiller et le maître allongeait quelques oreilles, souvent pour la forme; car il n'avait pas intérêt à sévir contre ce procédé qui lui permettait pour la plupart du temps de se chauffer lui-même à bon compte.

La bûche était appelée chauffe-dets (chauffe-doigts) par opposition à la chaufferette ou chauffe-pieds. Dans beaucoup d'écoles, on s'approchait à tour de rôle de la cheminée; aux yeux des élèves, le droit au chauffage était en raison de la quantité de bois apporté.

Au système des grandes cheminées succéda des poêles en fonte. On adopta en plusieurs endroits le poêle à cloche, dont le dessus à la forme d'une grande cloche d'une hauteur à peu près égale à celle du foyer proprement dit; nous en avons trouvé encore quelques échantillons dans les écoles d'aujourd'hui. Le bois apporté était souvent scié par les grands élèves, soit pendant la classe même, soit en dehors des heures d'étude.

Pour éviter les déprédations commises par les grands élèves, l'instituteur, dans certaines communes, se chargeait du chauffage moyennant une rétribution mensuelle. Dans les écoles de filles, les élèves apportaient une chaufferette qu'elles prenaient soin de garnir de braise à la maison matin et soir.

Les premières chaufferettes s'appelaient des marmottes. (voir dessin n° 1 ci-après). Elles consistaient en une espèce de vase en terre, de ventre arrondi de 0m18 à 0m20 de diamètre, d'ouverture plus étroite 0m10 environ de diamètre sans couverture, qu'on remplissait de braise et qui avait la propriété de brûler les bas. Pour l'apporter à l'école, on attachait aux deux anses une ficelle qu'on tenait à la main.

A cette chaufferette primitive succéda un chauffe-pieds, muni d'une craule à peu près tel qu'on voir dans l'image n° 2. On appelait craule ou carot soit un vase cylindrique en terre, peu profond (n° 3), muni d'une seule anse, soit, par extension, le fond d'un vase quelconque brisé (n° 4).

Ce système de chauffage était encore employé dans un grand nombre d'écoles de filles des Deux-Sèvres, au début de ce siècle. Les institutrices même donnaient l'exemple. L'inspection académique a du faire une campagne vigoureuse pour réagir contre cet abus au nom de l'hygiène et de la santé des maîtresses.

Il n'a pas fallu moins que deux accidents mortels survenus coup sur coup, en 1902 à des élèves qui rendaient en classe avec leurs chaufferettes, pour ouvrir les yeux des familles sur les dangers de cette pratique.

Dans de nombreux tableaux des brodeuses, des couturières, des dentellières, souvent assises près d'une fenêtre, sont représentés les pieds posés sur une chaufferette.